Le 12 juillet 179O l’Assemblée Constituante vota la Constitution Civile du Clergé. Tous les évêques et les curés devaient être nommés par les électeurs.
Chaque département eut son évêque élu, chaque paroisse fut pourvue d’un curé constitutionnel. Il s’ensuivit une lutte entre les anciens titulaires et les nouveaux élus. Beaucoup de prêtres « insermentés » (qui n’avaient pas prêté serment) trouvèrent refuge à Rouen. En août 1792 leur nombre dépassait 8.000. Le 26 août 1792 l’Assemblée Nationale (qui avait remplacé l’Assemblée Constituante) ordonna que tous les ecclésiastiques n’ayant pas prêté serment ou l’ayant renié devaient sortir du Royaume dans un délai de 15 jours sous peine d’être déportés en Guyane.
Le 3 septembre, à l’heure où Rouen apprenait les massacres à Paris par les milices des quartiers qui firent 1440 morts, un navire « Le Courrier du Nord », capitaine Duchesne quittait Rouen avec à son bord 57 prêtres munis de passeports à destination d’Ostende. Le navire arriva à Quillebeuf le 7 au soir et le capitaine fit viser les passeports à l’Amirauté.
Dans la matinée du 8 les habitants des communes autour de Quillebeuf parlèrent de prendre d’assaut le navire. Ils réussirent à monter à bord et obligèrent les prêtres à se rendre à terre, le maire de Quillebeuf, Louis René Nicolas Godard, promit d’enfermer les religieux. Le soir même un courrier fut envoyé au district de Pont-Audemer. Celui-ci se réunit dans la nuit du 8 au 9 sous la présidence de Monsieur Guidel et décida d’envoyer à Quillebeuf deux commissaires, Messieurs JL. Lejeune et JM. Mattard pour y faire promulguer la loi du 26 août. Ils arrivèrent à Quillebeuf le lendemain matin et virent qu’un autre navire « Le Modeste », capitaine Asselin avec 52 prêtres à bord était mouillé en Seine. Le capitaine Asselin fit viser leurs passeports qui étaient tous en règle mais se vit interdire de quitter Quillebeuf.
La nuit suivante la Garde Nationale et les responsables se rendirent à bord et demandèrent aux prêtres de venir à terre, ce qu’ils firent.
Le lendemain des émeutiers réunis au nombre d’au moins 1500 ne voulurent rien savoir allant même prétendre que les deux envoyés du district étaient des prêtres déguisés pour sauver les autres.
Une note fut envoyée à l’Assemblée Nationale mais huit jours plus tard toujours aucune réponse. Il fut décidé avec le curé assermenté de Bourneville, le père Levesque, que les Quillebois feraient usage de « leur souveraineté ». La date du massacre fut fixée au dimanche 16 septembre. Entre temps, un prêtre qui avait pu s’échapper arriva à Rouen et alerta les autorités sur la situation à Quillebeuf. Il fut décidé d’envoyer un détachement de la Garde Nationale pour libérer tous les prêtres et les ramener à Rouen sains et saufs.
Un troisième navire « Le Petit Neptune » de Dunkerque, capitaine Pluket, allant de Rouen à Ostende avec 114 prêtres fit demi-tour à La Mailleraye le 15 et arriva à Rouen le 18 septembre après avoir été prévenu de ce qui se passait à Quillebeuf.
A Rouen tous les passeports furent renouvelés et tous les prêtres purent rejoindre Dieppe d’où ils embarquèrent soit pour Ostende, soit pour l’Angleterre et la plupart d’entre eux ne revint qu’en 1802 après la signature du Concordat avec le Pape.